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Cykada
Metamorphosis
A1
Crystalline Peaks
A2
Fallacy
A3
So Divided
A4
3301
B1
The Cracks In The Bricks (Prologue)
B2
The Cracks In The Bricks
B3
Ashen Faun
B4
Last Throes of the Temporal Monolith
Deuxième album par CYKADA Metamorphosis Astigmatic Poland
La Cigale, ayant glandé tout l'été, se trouva fort dépourvue, quand la chronique fut venue : pas un seul petit morceau, si ce n'est vite fait quelques impros. Elle alla crier famine, chez la Fourmi sa voisine, la priant de lui prêter, quelque chanson pour subsister jusqu'à la saison nouvelle. « Je vous paierai, lui dit-elle, avant l'août, foi d'animal, intérêt et principal ». La Fourmi n'est pas prêteuse : c'est là son moindre défaut. « Que faisiez-vous au temps chaud ? » dit-elle à cette emprunteuse. Nuit et jour à tout venant, je jammais, ne vous déplaise. Vous jammiez ? J'en suis fort aise. Eh bien ! Dansez maintenant ! ».
Une variation sur le thème de la cigale et de la fourmi se prêtant élégamment à définir en substance la dernière production de Cykada, une cigale en polonais, un sextuor de jazz en anglais, et dans notre escarcelle un deuxième album dont on espérait beaucoup mieux qu'un semi-exercice de jam. Cykada, collectif londonien auteur en 2019 d'un premier album éponyme plein d'attraits, mêlant jazz inspiré de John Coltrane au cosmic jazz de Sun Ra, à des touches électroniques de jeu Super NES, à de l'afrobeat dansant, et à un foisonnant psychédélisme sonore qui les plaçait autant en héritier de traditions multiculturelles qu'en une entité fascinante, novatrice, et indéfinissablement protéiforme.
Des bases reprises sur ce deuxième album, Metamorphosis, et sa première véritable chanson : Fallacy. Une mue de la cigale vers un corpus plus oriental, un riff lourd qui nous tire par la main dans les souks clandestins des astroports fantômes du système Corrélien, les signatures rythmiques s'effacent, les tempos se divisent, on se laisse guider sans y comprendre grand-chose, mais on fait confiance, comme tout bon protagoniste. So Divided se voit ensuite prêcher l'unité sous forme de chant traditionnel arabe : nous vivons sur une planète, pas sur une nation, et si le message est le bon, c'est là que la musique commence doucement à nous perdre dans toutes ses intrications.
Un jazz de plus en plus complexe, des solos dissonants suivant des gammes qui n'existent pas encore, une batterie frénétique sans bouton d'arrêt d'urgence, et même si l'on trouve toujours ça et là d'excellentes idées, l'ensemble se méli-mélote dans son propre méli-mélo, et les thèmes passent sans marquer la feuille, comme une imprimante en manque de cyan. Chaque ambiance, chaque figure rythmique donne l'impression d'un bloc de marbre à peine effleuré, d'idées pressenties jamais réalisées, et finalement nombre de regrets quand l'on écoute le lourd beat électronique de Ashen Faun n'être qu'une sous-couche de peinture recouverte de tapisserie baroque surchargée, pleine de biches, de feuilles de houx, et de cors de chasse.
A l'heure où le jazz s'est métamorphosé, éclaté par parties pour exister différemment, dans le hip-hop de Hocus Pocus et d'Oxmo Puccino, dans l'afrobeat-pop-funky du Ezra Collective, dans le post-rock de Maruja et For Breakfast, dans le post-punk de DEADLETTER, dans l'électro-cosmique de The Comet Is Coming, dans toutes ces formes et tant d'autres, Cykada peuvent-ils se contenter de proposer une Metamorphosis orientalisée jouant le jazz comme en 1964 ? A cette longue et extensive question, nous répondrons simplement non, car comme va la java le jazz est mort, et vive le jazz !
Rédigé par Adonis Didier, le 28 novembre 2023